mercredi 29 décembre 2010

The unshaken genius of Mauro Pawlowski

Une des raisons pour lesquelles je déteste faire des listes de fin d'année, c'est que je découvre systématiquement certains de mes disques favoris de l'année avec 6 mois de retard. Ça avait par exemple été le cas en 2009 avec l'album d'Emptyset (qui m'avait été ardemment recommandé par mes ex-comparses de Get The Curse) et celui de Timber Timbre (découvert dans un des premiers épisodes de la saison 3 de Breaking Bad et dont j'avais d'ailleurs parlé précisément à ce moment là). Cette année, le retour de bâton aura été bien plus rapide, puisque c'est quelques jours à peine après avoir posté mon top 2010 que je suis tombé sur Damascus, le premier album de Radical Slave, énième projet du fantasque Mauro Pawlowski.

Songwriter de génie, obsédé sexuel notoire, showman d'exception et authentique psychopathe, Mauro Antonio Pawlowski, flamand d'origine italo-polonaise, s'est fait connaître au milieu des années 90 avec son groupe Evil Superstars, fer de lance de la scène indé belge de l'époque, aux côtés de dEUS (dont il deviendra le guitariste une douzaine d'années plus tard). Croisement hors-limites entre Girls Against Boys et Queen (ce qui signifie, en gros, que ça ressemblait assez clairement à Brainiac), Evil Superstars sortira son premier album (Love Is Okay) en 1996, date à laquelle j'aurai la chance de découvrir le groupe sur scène, à l'occasion d'un fulgurant concert à domicile, au festival Pukkelpop. Une prestation dont quelques images figurent justement dans la vidéo promo ci-dessous, aux côtés de nombreux extraits de l'album.



Lyrics absurdes, télescopages hystériques et embardées épileptiques, Love Is Okay, au moins aussi épuisant, sinon plus, que les concerts du groupe, sera snobé à peu près partout, si ce n'est en Angleterre et évidemment en Belgique, où le groupe jouit très vite d'une certaine popularité. Pawlowski rejoindra la même année Kiss My Jazz, collectif expérimental anversois dans lequel on retrouvera également Rudy Trouvé, Stef Kamil Carlens et Craig Ward de dEUS, avec qui il enregistrera deux albums (In Doc's Place Friday Evening et In The Lost Souls Convention), avant de se lancer dans la réalisation du second et dernier album d'Evil Superstars, Boogie Children-R-Us. Un disque nettement plus singulier et ambitieux que Love Is Okay, mais également plus accessible (l'album contient les deux titres les plus connus du groupe : "It's A Sad Sad Planet" et "Oh Girl"), et qui vaudra à Evil Superstars un retour triomphal au Pukkelpop en 98, pour ce qui sera leur tout dernier concert, Pawlowski ayant annoncé leur split quelques semaines auparavant. Par chance, j'étais aussi à ce fameux concert, où, pour l'anecdote, on pouvait, en jonglant entre les deux scènes principales, s'enfiler d'une seule traite rien de moins que Spiritualized, Girls Against Boys, The Afghan Whigs, Evil Superstars, PJ Harvey, Soul Coughing et Portishead. Aucun de ces groupes ne réussira pourtant ce soir-là à éclipser la prestation des belges, en sur-régime devant un public littéralement déchaîné, qui les retiendra sur scène bien au-delà du temps imparti, les obligeant à jouer l'intégralité de Boogie Children-R-Us, à commencer par l'imparable "B.A.B.Y."



Après la séparation d'Evil Superstars, Mauro Pawlowski enregistrera un dernier album avec Kiss My Jazz (In A Service Station, en 1999) et rejoindra Mitsoobishy Jacson, un autre collectif belge formé par des membres de Nemo et Dead Man Ray, avec qui il sortira un LP la même année (Boys Together Outrageously). En 2001, il devient guitariste de Monguito (groupe free-jazz d'Anvers dont la discographie se résume à deux EPs auto-produits disponibles uniquement sur cassette audio) et sort son premier album solo, Songs From A Bad Hat, sous le simple nom de Mauro. Un disque très pop et immédiat, aux antipodes de ses précédents projets, et qui passera totalement inaperçu malgré des morceaux gigantesques, comme l'imparable "Everybody's Friend", interprété ici en mode total Eurovision à la télévision flamande.



Durant les années qui suivront, Mauro Pawlowski multipliera les projets expérimentaux (en solo ou avec des groupes et collectifs plus ou moins éphémères comme The Parallels, Othin Spake, The Love Substitutes, iH8-Camera, Possessed Factory ou Somnabula), revenant brièvement au son des premiers Evil Superstars en 2004, le temps de l'excellent Black Europa, premier et unique album de Mauro Pawlowski And The Grooms, dont est extrait "What It Takes", joué ici en live à Gent en juin dernier.



Peu après la sortie de Black Europa, Mauro Pawlowski deviendra le guitariste de dEUS (avec qui il enregistrera l'excellent Vantage Point, sur lequel il signe plusieurs morceaux), ce qui ne l'empêchera pas de continuer à multiplier les collaborations extérieures (avec l'écrivain néérlandais Ramsay Nasr en 2008 ou la compagnie de danse contemporaine Ultima Vez en 2009), ni de former un nouveau groupe, Radical Slave, qui a sorti cette année l'incroyable Damascus, album enregistré live d'une seule traite et secret le mieux gardé de 2010, qui annule sans le moindre effort les derniers Grinderman et The Fall. Preuve sur pièces avec le toxique "Before We Got Rich", paradoxalement un des morceaux les plus faibles du disque.

1 commentaire:

  1. hey, super post, ça me rappelle plein de bonnes choses tout ça. Somnabula en live entre autres ...

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